Quatre mois se sont déjà écoulés depuis les dernières élections présidentielle, législatives et provinciales. Mais les médias sont toujours pris d'assaut par les politiciens congolais.
À part la politique, les autres problèmes de la vie nationale peinent à prendre la une des médias tant nationaux, numériques et ceux internationaux qui ont des pages consacrées à l'Afrique en général, et à la RD Congo en particulier.
Ce focus médiatique va-t-il dans le sens des préoccupations du commun des citoyens congolais ?
Au fin fonds des brousses congolaises ainsi que dans les nombreux quartiers miséreux des villes du pays, quand les citoyens se lèvent, ils sont directement confrontés à des problèmes existentiels terribles du genre:
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Trouver de quoi nourrir leurs membres de famille pour la journée,
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Avoir de quoi soigner la malaria qui frappe un des enfants,
Pendant ce temps, les politiciens congolais se répandent en conciliabules, déclarations... Encore un peu, les politiciens congolais pourraient convoquer la presse pour informer l'opinion qu'ils viennent d' inventer la roue.
Pourquoi cette agitation continue des politiciens congolais ? Ils veulent être suivis par tout ou partie de la population dans leur vision de l'après-élections.
Pourtant, ils savent très bien qu'un pays ne peut vivre éternellement dans une crise post-électorale. Les élections sont (devraient être) cycliques, à l'image du cycle général de la vie.
Et la vie des paysans congolais est elle, régentée par ce cycle.
Pour la majorité des Congolais, la période électorale est une parenthèse dans leur vie quotidienne qui est déjà assez dure.
Par contre, pour la plupart des politiciens congolais, la politique c'est leur activité quotidienne. Devraient-ils pour autant prendre le peuple en otage ?
Pourquoi les politiciens congolais ne devraient-ils pas intérioriser ce sens cyclique de la vie, et de la vie d'une nation ?
Les élections ? Parlons-en.
Au lendemain des élections de 2011, ceux qui se disaient opposants ou ceux qui aller migrer plus tard vers l'opposition, savaient tous qu'il y aurait bien un jour organisation des élections. Ils avaient suffisamment de temps pour se préparer afin de battre campagne, faire des alliances, et accéder au pouvoir.
Ils savaient tous que Joseph Kabila n'était pas un enfant de chœur qui allait leur céder le pouvoir sur un plateau. Ils savaient tous très bien qu'ils avaient une obligation pour espérer défenestrer Joseph Kabila et son système : s'unir. Faute de quoi, la débâcle était assurée.
Ce sont-ils unis ? Non, ils ont pris le malin plaisir d'affronter le clan Kabila en ordre dispersé. Impossibilité de mettre leurs Ego de côté ? Stratégies électorales de bas niveau ? Oui, tout cela, et bien d'autres approximations.
Et à l'arrivée, il y a eu ce qu'il y a eu comme issue du processus électoral. Était-il si difficile pour un homme avisé de prédire pareille déroute?
Où est la faute du peuple ?
Pourquoi les politiciens congolais ne peuvent-ils pas s'assumer ?
Durant près d'un an, le peuple congolais a été mobilisé pour les élections : pression pour la tenue effective des élections, enrôlement, campagne, élections. Le peuple a fait sa part.
Durant cette période, connaissant la filouterie de leur adversaire commun, les politiciens congolais auraient dû exceller en inventivité, anticipation et autres stratégies pour qu'au final, ils atteignent leur objectif à savoir : accéder au pouvoir. Durant cette période, le peuple était à leur écoute. Que lui ont-ils dit ?
Après la période électorale, devrait-on encore garder le peuple avec soi ? Ne devrait-on pas le laisser rentrer vaquer à ses occupations et chercher à survivre ?
Mieux, les politiciens, toutes tendances confondues, ne devraient-ils pas s'occuper des problèmes quotidiens du peuple ? Oui, le peuple a beaucoup de problèmes qui exigent des solutions urgentes.
De la part des politiciens, s'arc-bouter indéfiniment dans la posture électoraliste ne revient-il pas à prendre sournoisement le peuple en otage ?
Au lendemain du retour au multipartisme en 1990, parlant des politiciens, certains médias écrivaient plutôt : « politi-chiens », avec une volonté peu dissimulée de moquerie.
Trente ans après, les politiciens congolais peuvent-ils regarder le peuple congolais droit dans les yeux et lui dire qu'ils ont évolué et qu'ils méritent plus d'égard?
Bruxelles, le 2 mai 2019
Cheik FITA