La chambre préliminaire chargée de confirmer les charges contre Bemba a clos ses audiences ce jeudi 15 janvier 2009, peu après dix-huit heures.
Lors des séances de l’après-midi, l’accusation a maintenu sa position, à savoir que Bemba était coupable des charges portées contre lui. Comme lors de la séance d’ouverture, l’accusation a décrit la façon dont les femmes, enfants et hommes étaient violés ou sodomisés. Et il est difficile de ne pas être fortement touché en imaginant ce qu’auraient ressenti les victimes.
Les représentantes des victimes ont également parlé, entièrement ralliées à la thèse du procureur.
Devant avoir le dernier mot, la défense par Me Kahn a rappelé que :
- Ceci n’était pas un procès mais une procédure,
- Les éléments de preuves laissaient à désirer,
- Les témoins n’ont pas été entendus, les témoins anonymes ayant très peu de poids. Le ouï-dire a été une des principales sources d’information du procureur.
Il a demandé aux juges de tenir compte des divergences, des contradictions, des manquements.
L’accusation n’a pu apporter suffisamment de preuve sur la question de subordination.
L’enquête a été superficielle, et faite bien longtemps après les faits.
A quoi Bemba était-il le plus concentré à l’époque des faits, à la Centrafrique ou aux négociations politiques qui se déroulaient en Afrique du Sud pour le processus démocratique au Congo ?
Tel que l’accusation s’exprime on aurait l’impression que Bemba avait en permanence des jumelles tournées vers la Centrafrique !
Cela n’est-il pas de la malhonnêteté intellectuelle ?
Suivra alors la projection de deux vidéos prises à l’époque en Centrafrique et où les intervenants, des responsables, affirmaient que le MLC les avaient libéré et que monsieur Bemba devait être remercié pour cela.
Suivra alors une réplique de l’accusation qui n’acceptait pas qu’un tel élément soit inclus dans la déclaration finale.
La juge-présidente calmera le jeu en proposant à l’accusation d’intervenir. Le camp du procureur préférera finalement transmettre à la cour une réaction écrite.
En conclusion, pour la défense, il n’y avait pas suffisamment d’éléments pour détenir Bemba et qu’il devrait être libéré.
Avant de lever la séance, la juge présidente demandera aux deux partis de transmettre en 25 pages maximum, leurs remarques. Date limite, le 26 janvier avant 16 heures.
La décision de la chambre sera prononcée 60 jours après le 26 janvier.
Comme lors de la journée d’ouverture, il y a eu une forte présence de la communauté congolaise. A se demander par où étaient passés les centrafricains, eux les premiers concernés !
Quant à la presse belge et internationale qui avait annoncé en fanfare l’arrestation de Bemba, elle n’a pas semblé intéressée par le déplacement.
Après cette audience publique et que la suite de l’affaire est entre les mains des juges, un certain nombre de questions gênantes se posent :
- L’image de la CPI, s’est-elle améliorée ?
- Le juge Moreno en sort-il grandi ?
- Les Congolais n’ont-ils pas l’impression d’être devant une justice à deux vitesses, au vu des millions de victimes congolaises pour lesquelles la CPI n’a toujours rien proposé de concret ?
- Bemba ayant quand même rallié à lui près de la moitié de l’électorat congolais, cette affaire est-elle profitable au difficile processus démocratique congolais ?
- Le pouvoir de Kinshasa est-il vraiment innocent dans cette affaire ou n-a-t-il pas joué à fond la carte de politisation à outrance ?
- Le pouvoir actuel en Centrafrique n’a-t-il pas boutiqué cette affaire comme blanchiment pour son passage en rébellion ?
Cheik FITA
Bruxelles, le 16 janvier 2009