En ce 21ème siècle, il est impensable que dans un pays l’on puisse vivre comme dans une jungle où c’est la loi du plus fort qui est appliquée. En analysant de près le mode de fonctionnement de la RD Congo, on constate hélas que c’est bien le cas, et même pire. Cela doit-il continuer ? Jusque quand ? Comment nous en sortir ?
Quand on examine le mode d’accession au pouvoir de tous ceux qui dirigent aujourd’hui la RD Congo, de la base au sommet, il est effrayant de constater qu’aucune structure de l’état congolais n’est dirigée par une personne ayant la légitimité du peuple.
Voici.
L’article 5 de la constitution de la RD Congo dit ceci :
« La souveraineté nationale appartient au peuple. Tout pouvoir émane du peuple qui l’exerce directement par voie de référendum ou d’élections et indirectement par ses représentants. Aucune fraction du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice. »
Or que constatons-nous aujourd’hui ?
À tous les niveaux du pouvoir, on ne retrouve que des individus n’ayant aucune légitimité du peuple.
Quels sont ces niveaux du pouvoir ?
L’article 2 de la constitution y répond :
« La République Démocratique du Congo est composée de la ville de Kinshasa et de 25 provinces dotées de la personnalité juridique. Ces provinces sont… »
L’article 3 complète :
« … Les provinces et les entités territoriales décentralisées de la République Démocratique du Congo sont dotées de la personnalité juridique et sont gérées par les organes locaux. Ces entités territoriales décentralisées sont la ville, la commune, le secteur et la chefferie. »
Il n’est plus nécessaire de remonter jusque Mobutu parce l’AFDL l’avait chassé pour faire mieux.
En 2002, il y eut le dialogue inter-congolais pour baliser la marche du pays.
Et à l’issue de ce dialogue, des accords furent signés. Ceux qui étaient arrivés au pouvoir avaient pris l’engagement de :
Faire un recensement de la population,
Organiser un référendum constitutionnel
Organiser les élections de la base au sommet.
Quel bilan aujourd’hui ?
Y a-t-il eu recensement général de la population ? Non.
Y a-t-il eu référendum constitutionnel ? Oui.
Y a-t-il eu des élections de la base au sommet ? Non.
Et aujourd’hui, à quel niveau du pouvoir retrouve-t-on des élus ?
Les chefferies ? Non.
Les secteurs ? Non.
Les communes ? Non.
Les villes ? Non.
Les provinces ? Il y eut des gouverneurs élus de 2007 à 2012.
Et aujourd’hui ? Avec la mise en place précipitée et irréfléchie des vingt-six provinces, à la tête de ces 26 provinces, il y a été parachutés des individus venant de nulle part!
Le pouvoir législatif n’est pas en reste.
À la chambre basse, la plupart de ceux qui se disent « majorité présidentielle » ne sont que des députés nommés et ayant atterri dans l’hemicycle via la corruption ou le bourrage des urnes.
Les sénateurs sont les plus culottés. Sans mandat du peuple depuis 2012, ils continuent à siéger et même à légiférer, toute honte bue.
Jusqu’il y a peu, il y avait des assemblées provinciales périmées depuis 2012 !
À la Présidence ?
C’est un secret de polichinelle, monsieur Joseph Kabila est à la tête du pays suite au hold-up électoral de novembre 2011.
Même en considérant le score officiel qui lui avait été attribué, après bourrage d’urnes et falsification des chiffres, monsieur Joseph Kabila n’avait été crédité que de 48,9%, soit 8.880944 voix. Sur terrain, par rapport aux 70.000.000 de Congolais, cela représente 12,68%. Représentait car c’était en 2011, dans l’entretemps, une grosse partie de ceux qui faisaient confiance à monsieur Kabila lui ont définitivement tourné le dos, en commençant par son« fief », le Katanga dans son ancienne configuration !
En considérant l’article 5 de la constitution qui dit :
« La souveraineté nationale appartient au peuple. Tout pouvoir émane du peuple qui l’exerce directement par voie de référendum ou d’élections et indirectement par ses représentants. Aucune fraction du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice. »
Il est navrant de constater que tous les actuels dirigeants des provinces, villes, communes, secteurs, chefferies, sont là en violation flagrante de la constitution.
Partant de cela, les 70.000.000 de Congolais sont-ils obligés d’obéir à ces « individus qui s’attribuent illégalement l’exercice du pouvoir » ?
Non, malheureusement.
Le vendredi 23 octobre 2015, depuis Bruxelles, le parti d’opposition UDPS avait lancé un ultimatum à monsieur Joseph Kabila pour un éventuel dialogue afin de baliser le processus électoral.
Apparemment, le message avait été entendu en face. Suffisamment ? Il y a des doutes car, par-ci par-là des propos nauséabonds de certains kabilistes sont entendus prônant une transition. Avec ou sans Kabila ?
Si au delà du 28 novembre 2015, cet éventuel dialogue n’avait pas encore commencé, mieux, s’il n’était pas encore terminé, l’UDPS et les autres partis d’opposition ne devraient-ils pas amorcer la pression sur ce pouvoir illégitime ?
Pourquoi le 28 novembre ?
Le 28 novembre est une date symbolique. En 2011, il y a quatre ans, le clan Kabila avait exécuté un plan minutieusement conçu de longue date pour s’accaparer du pouvoir via des résultats électoraux mensongers. Si après quatre ans les kabilistes n’expriment aucun regret face à cet acte d’usurpation du pouvoir, les Congolais devraient en tirer toutes les conséquences.
Selon l’article 5 de notre constitution, aujourd’hui, les kabilistes constituent un conglomérat d’ « individus qui veulent s’attribuer l’exercice du pouvoir. »
Le peuple congolais le sait. Dans son subconscient collectif, après le 28 novembre 2015, le rejet du pouvoir en place ira crescendo. L’impopularité et le rejet de Joseph Kabila et son système sont tels, que son régime a désormais plus intérêt à préparer l’alternance, qu’à se cramponner désespérément au pouvoir. En énervant la constitution, le régime de monsieur Kabila s’est définitivement aliéné l’opinion du peuple congolais. Les signes de fin de règne ne trompent pas.
À tout moment, une étincelle peut pousser le peuple congolais à s’approprier l’ultimatum de l’UDPS.
Bruxelles, le 16 novembre 2015
Cheik FITA