Mardi 18 octobre 2016, sous la facilitation du togolais Edem Kodjo, les participants au pseudo-dialogue congolais ont signé un accord politique accordant un mandat de quinze mois au Président sortant Joseph Kabila, et le poste de Premier Ministre à un « opposant », Vital Kamerhe étant le plus cité.
Pseudo-dialogue parce que n' ayant été ni dialogue, ni inclusif, ni national et ne regroupant que des gens d'une même obédience politique.
Cet accord :
- Va-t-il mettre fin à la crise politique congolaise ou va-t-il plutôt l'exacerber ?
- Est-il un élément pacificateur ou le contraire ?
- Va-t-il favoriser un grand consensus national ou par contre va-t-il approfondir le fossé qui existe entre les dirigeants actuels et le Peuple ?
Sans remonter jusqu'au déluge, la crise politique congolaise a comme origine le hold-up électoral de novembre 2011 qui avait permis à Monsieur Joseph Kabila de se maintenir au pouvoir.
Le 20 décembre 2011, Joseph Kabila avait prêté serment devant un désert diplomatique avec comme seule personnalité venue de l'occident, Didier Reynders, ministre belge des affaires étrangères.
Joseph Kabila aurait respecté la vérité des urnes, la RD Congo n'en serait pas là.
Durant les trois dernières années de son deuxième et dernier mandat qui s'achève le 19 décembre 2016 à minuit, le Président sortant a cherché désespéramment des moyens pour se maintenir au pouvoir au-delà du 20 décembre 2016 avec des tentatives de modification de la loi électorale et même de la constitution.
Joseph Kabila se serait abstenu de ces manœuvres, la RD Congo n'en serait pas là avec en sus, des morts inutiles.
La CENI, Commission Électorale Nationale Indépendante qui a le devoir de planifier et d'organiser les différentes échéances électorales a ajouté sa couche à la crise politique. Au lendemain des élections de 2011, la CENI devait s'atteler à l'organisation des différentes élections, et surtout à la présidentielle dont les délais butoirs sont expressément consignés dans la constitution.
La CENI aurait accompli sa tâche, la RD Congo aurait évité cette crise politique. La CENI devait chaque année exiger au gouvernement les moyens pour l'organisation des suffrages.
La CENI et ses dirigeants auraient accompli leur devoir, la RD Congo aurait évité une crise politique.
Des personnes et des partis politiques se disant de l'opposition ont durant longtemps claironné le respect de la constitution.
À la convocation par monsieur Kabila de son dialogue, petit à petit, on a vu des hommes politiques dits de l'opposition changer progressivement de langage, critiquer de plus en plus ceux avec qui ils sont dans l'opposition, épargnant de plus en Joseph Kabila au point de lui jeter des fleurs les derniers jours.
À quoi pourrait être dû ce revirement ?
Sans peur d'être contredit, il est possible d'affirmer ceci :
- Sur les 300 personnes qui ont signé l'accord du camp Tshatshi, mise à part la moitié qui était de fait de la mouvance kabiliste, l'autre moitié qui était sensée représenter la société civile et l'opposition était ainsi composée :
- Un premier groupe, constitué de gens qui n'ont jamais coupé le cordon ombilical avec Kabila et qui recevaient régulièrement de l'argent du pouvoir. Ceux-là avaient une dette morale face au Raïs.
- Un deuxième groupe, composé de personnes qui ont perçu ces derniers temps de grosses enveloppes d'argent au point de vendre leur âme au diable. Désormais et sans honte, ils disent le contraire de ce qu'ils affirmaient il y a peu.
- Un troisième groupe, composé de tous ces affamés propriétaires de partis politiques-mallettes ou d'associations bidons, grands chasseurs de per diem devant l'éternel. Pour eux, participer au dialogue du Camp Tshatshi était une aubaine financière : certaines sources ont parlé de 300 dollars par jour et par personne, durant les cinquante jours du pseudo-dialogue !
Ainsi, parmi ceux qui se disent opposants et qui étaient à ces assises, y en-t-il eu qui n'ont été motivé que par une conviction politique, un idéal ?
On peut en douter. Autant chercher une aiguille dans une botte de foin!
De part la composition des participants à ce forum et sans entrer dans le contenu de cet accord du camp Tshatshi, peut-on raisonnablement prétendre que ce document devrait être opposable à tous les 70 millions de Congolais ?
Les Congolais se reconnaîtront-ils dans leur accord ?
Rêve de fou.
Que pense le Peuple congolais face à ce qui ressemble à un cirque ?
Le Peuple Congolais se considère-t-il honoré ou trahi ?
Les dirigeants actuels auxquels il faut ajouter désormais les néo-kabilistes, transfuges de l'opposition, auront-ils la confiance du peuple ?
Depuis le mardi 18 octobre 2016, la crise politique congolaise est terminée ou est-elle relancée de plus belle ?
Le climat qui règne désormais en RD Congo est-il proche de la paix ou de l'affrontement ?
Le Peuple congolais gobera-t-il sans broncher cette nouvelle donne politique ou va-t-il se révolter contre ces usurpateurs de pouvoir ?
Cet accord poussera-t-il le Peuple Congolais à accepter la présence de Joseph Kabila à la tête de la RD Congo après le 19 décembre 2016 ? Alors que depuis des mois, dans la bouche du plus petit enfant qui apprend à parler au vieillard, une seule phrase sort: "Kabila doit partir!"
Ceux qui se préparent à diriger la RD Congo au mépris de la constitution, sont-ils conscients qu'ils seront comptables des effets pervers, voire même des morts? S'il y a affrontements ?
Obnubilés et envoûtés par le pouvoir et l'argent, les signataires de l'accord du camp Tshatshi ne se sont peut-être pas posés ces questions, mais très bientôt, une évidence s'imposera à eux :
Pour le Peuple congolais, loin d'être un acte de bravoure, leur « accord » est une haute trahison, un mépris, une insulte aux différentes victimes du combat pour la démocratie en RD Congo.
Les « dialogueurs » du Camp Tshatshi viennent de déclarer la guerre au souverain primaire.
Parmi eux pourtant, il y en a qui disaient encore il y a peu : « Il n'y a aucune armée qui peut vaincre un peuple déterminée ».
Les « dialogueurs » du Camp Tshatshi sont aujourd'hui cette armée qui se prépare à affronter un Peuple déterminé. Au lieu de pacifier le pays, leur acte sera l'élément déclencheur d'une probable révolte populaire.
Bruxelles, le 19 octobre 2016
Cheik FITA